Inherent Vice, l'oeuvre psychédélique de Paul Thomas Anderson

PAUL THOMAS ANDERSON

Romain Jankowski

9/26/20252 min read

Avec INHERENT VICE, Paul Thomas Anderson signe son film le plus insaisissable. Adapté du roman labyrinthique de Thomas Pynchon, le cinéaste plonge Joaquin Phoenix dans une enquête à la fois burlesque et mélancolique, véritable trip cinématographique où se mêlent joints, complots et fantômes d’une Amérique désillusionnée.

Un privé dans la brume

Larry “Doc” Sportello, détective hippie au look débraillé, voit sa vie basculer lorsqu’une ex-compagne réapparaît pour lui demander de l’aide. Ce qui devait être une enquête simple se transforme en un enchevêtrement d’histoires impossibles à suivre : promoteurs immobiliers véreux, groupuscules nébuleux, flics ambigus et marginaux en tout genre. Mais chez Anderson, le polar n’est qu’un prétexte : INHERENT VICE est avant tout le portrait d’une époque en train de sombrer.

Après THE MASTER, Joaquin Phoenix retrouve Anderson pour incarner Doc avec une intensité différente : cabossée, drôle et fragile. Ses mimiques, ses silences, ses élans absurdes traduisent l’errance d’un homme dépassé par le monde qui l’entoure. Autour de lui, un casting foisonnant — Josh Brolin, Benicio Del Toro, Owen Wilson, Reese Witherspoon — donne corps à cet univers hallucinatoire où chaque apparition ressemble à une vision fugace. Il n'est pas toujours aisé d'entrer dans cette oeuvre qui libère sa forme afin d'explorer ses thématiques (nombreuses). L'intrigue est relayée au second plan, si bien qu'il est franchement difficile de se passionner pour cette plongée dans les 70s.

PTA dans le brouillard narratif

La force d’Anderson réside toutefois dans sa fidélité à l’esprit de Pynchon. Le cinéaste assume un récit volontairement brumeux, où les digressions comptent autant que l’intrigue principale. Le spectateur est invité à se perdre, à ressentir l’incertitude et la paranoïa des années 70. Le tout sublimé par une mise en scène en clair-obscur, une bande-son habitée par Neil Young et une voix-off quasi hypnotique. Sous ses dehors de comédie un poil enfumée, INHERENT VICE parle d’un monde qui se défait : le rêve hippie agonise, les idéaux de liberté s’évaporent dans la corruption et la violence. L’enquête de Doc n’est finalement qu’une métaphore de cette perte de repères collective, un adieu à une époque révolue.

Un film qui divise

À sa sortie, INHERENT VICE divise. Certains critiquent son opacité, d’autres louent sa singularité et son ambiance unique. Avec ce métrage, Paul Thomas Anderson ne trouve toujours pas son public avec 14 petits millions de dollars amassés (pour 20 millions de budget).