Shooting Dogs, plongée déchirante dans l'enfer du génocide rwandais

ANALYSES

Romain Jankowski

8/6/20252 min read

Sorti en 2005, SHOOTING DOGS est de ces films qui laissent une trace indélébile. Réalisé par Michael Caton-Jones, ce drame poignant s’inspire de faits réels survenus lors du génocide des Tutsis au Rwanda en 1994. Loin de la fiction spectaculaire ou de la reconstitution à grand renfort d'effets, le film adopte une sobriété bouleversante pour raconter une tragédie humaine d’une ampleur effroyable.

Face à l'horreur

Le long-métrage suit Joe Connor (interprété par Hugh Dancy), jeune professeur britannique, et le Père Christopher(joué par John Hurt), prêtre engagé sur le terrain, alors qu’ils tentent de protéger des centaines de réfugiés tutsis enfermés dans une école tenue par l’ONU. Très vite, les tensions montent, les forces onusiennes se désengagent, et la violence s’abat.

Le film fut notamment tourné sur les lieux mêmes du massacre, à l’école technique de Kigali. De nombreux survivants ont même participé au film, à la fois comme figurants et comme conseillers, ce qui confère une justesse et une gravité exceptionnelles au récit. Cette proximité avec le réel donne lieu à des séquences d’un réalisme glaçant. La mise en scène de Caton-Jones est d’une efficacité sèche : il ne cherche ni à enjoliver ni à choquer inutilement. Il capte simplement l’absurdité de la barbarie et la passivité de la communauté internationale. En effet, l'ensemble se distingue par sa représentation réaliste et sans concessions du génocide rwandais. Contrairement à HOTEL RWANDA (autre métrage se concentrant sur le conflit) le film de Michael Caton-Jones montre clairement les préparatifs du massacre, la mobilisation des milices extrémistes hutus, ainsi que la passivité et les limites des forces de l’ONU. Il illustre graphiquement l’horreur, la participation forcée des civils et le départ des soldats occidentaux, soulignant les responsabilités politiques. Ce long-métrage a pu ainsi ouvrir une réflexion importante sur les responsabilités face au génocide, en lien avec les débats historiques et politiques actuels, notamment autour du rôle de l’ONU et des autorités rwandaises. Autre point fort du film, les performances de John Hurt, bouleversant de dignité, apporte une profondeur morale au récit, et Hugh Dancy, qui incarne l’innocence confrontée à l’horreur.

Un film oublié

Si le film a été moins médiatisé que HOTEL RWANDA sorti peu avant, il n’en reste pas moins une œuvre essentielle, qui frappe par sa pudeur, son honnêteté et sa volonté de rendre hommage aux victimes sans jamais tomber dans le pathos facile. Malheureusement, SHOOTING DOGS est un peu tombé dans l'oubli, sa confidentialité au box-office ayant aussi joué en sa défaveur. Dès lors, Michael Caton-Jones ne tournera quasiment plus, hormis l'affreux BASIC INSTINCT 2 en 2006. Il se cantonnera à la Tv (notamment sur UN MONDE SANS FIN).