Critique de SUPERMAN

Superman, peut-être le plus grand super-héros de tous les temps, celui qui a offert au mythe sa définition totale. Il est devenu un archétype absolu, celui à qui on se réfère. Le parallèle est d'autant plus fort qu'il se présente de la même manière au cinéma : le premier film réalisé par Richard Donner est le fondement d'un genre dont l'âge d'or s'est matérialisé à partir des années 2000 avec la force du numérique.

L'histoire de Superman

Revoir SUPERMAN c'est revoir un film à la réussite totale. D'accord, les effets spéciaux ont vieilli, mais regarder une ancienne œuvre c'est se remettre dans un certain contexte. Les techniques révolutionnaires employées ne sont jamais là pour dominer un récit magnifique qui englobe tout : la quête de soi-même, l'affirmation du héros, la représentation de ce dernier par rapport à la population, l'ennemi qui veut l'abattre... Dominé par la musique étourdissante de John Williams, SUPERMAN se repose aussi sur un interprète né pour le rôle (Christopher Reeve) et sa relation géniale avec Margot Kidder (on ne parle pas assez de son talent, fabuleuse et unique dans la peau du personnage). Certains éléments ont pris un coup (l'horripilant Otis, certains traits d'humour un peu datés), mais c'est toujours, globalement, l'un des plus grands films super-héroïques jamais réalisés. La suite vaut également le coup d'œil malgré un rythme bien plus platonique, tandis que les troisième et quatrième virent à la farce. C'est d'ailleurs malheureux, car ils avaient quelques bonnes idées en stock.

Une refonte

Voilà ce que représente Superman, le bien, la volonté de défendre la veuve et l'orphelin. Il s'est adapté à notre époque avec trois autres films, l'un qui tentait de faire revivre un personnage hors de son temps (le trop sous-estimé SUPERMAN RETURNS), l'autre qui jouait à fond la carte christique (MAN OF STEEL, parfait dans sa première heure et qui décide de tout faire exploser lors de sa deuxième) et enfin un nouvel opus qui souhaite redonner l'espoir. Quel espoir dans un monde aussi étourdissant que le nôtre ? A-t-il toujours sa place dans une époque gavée d'écrans et d'informations en tous genres ? Le charme de l'homme d'acier peut-il toujours opérer ? Le SUPERMAN de James Gunn est une source de débats sans fin depuis sa sortie, entre les pro et anti Snyder, ceux qui pensent tout savoir du personnage, les haters, ceux qui croient avoir vu "le plus grand film de super-héros de tous les temps" (je vous assure que si, j'en ai vu quelques-uns)... Il est clair que ce personnage a encore sa place dans notre monde tant il nourrit les débats.

Débats sans fin

Mais le film mérite-t-il autant d'attention ? On est quand même en droit de se poser la question. Qu'il y ait de belles intentions, c'est tout à l'honneur de James Gunn. Encore faut-il qu'elles soient bien réalisées. On voit bien que la nuance ne fait pas partie des débats, et c'est bien dommage. SUPERMAN n'est ni un grand film, ni un film déplaisant. Il est dans un entre-deux, intéressant dans ce qu'il veut montrer, parfois lourdingue dans sa manière de procéder. On pouvait, par exemple, se passer d'antagonistes aussi peu intéressants. Hormis Lex Luthor, ils font vraiment peine à voir (que ce soit Ultra-Man, l'absurde Ingénieure ou encore l'étrange créature géante). Et vous connaissez l'adage, sans grand méchant... Pourtant, Superman paraît surclassé durant une grande partie du métrage alors que les forces en présence sont normalement loin d'être insurmontables pour lui. L'idée que ce Superman soit très humain est bonne, mais fallait-il aller jusqu'à le montrer sauver un écureuil ? Chacun aura son avis sur la question.

Rien de transcendant donc, hormis une excellente scène entre Clark et Loïs. Une interview qui vire à l'affrontement. Voilà un passage bien écrit, joué avec conviction par David Corenswet et Rachel Brosnahan, tous deux plutôt bons dans la peau de leurs personnages respectifs. D'ailleurs, je suis assez déçu que Gunn n'ait pas davantage approfondi le personnage de Clark Kent. Il disparaît derrière Superman, laissant peu de place à ces scènes "humaines" qui ont toujours fait la force de la saga. Dans MAN OF STEEL, ce ne sont pas les séquences d'action qui marquent les esprits, mais ces instants où Clark mène sa vie, entre passé et errements. Dans les SUPERMAN de Reeve, c'est la dualité des deux protagonistes qui lui donne de l'ampleur. Il y a bien un moment assez doux avec Jonathan Kent (joué par Pruitt Taylor Vince), mais le tout manque vraiment d'émotions. Un comble pour un film qui souhaite mettre l'humain au premier plan.

Nouvel univers

En revanche, le héros est bien entouré. Le "Justice Gang" est sympa (surtout Mr. Terrific), rappelant au passage que le réalisateur est bon dans la dynamique de groupe. Krypto joue son rôle également, avant tout pour divertir, mais certains passages fonctionnent. En revanche, difficile d'être totalement convaincu par Lex Luthor. ll y a indéniablement du potentiel, mais j'ai trouvé que le choix de Nicholas Hoult n'était peut-être pas le bon pour l'incarner. C'est un très bon acteur, aucun doute là-dessus (le récent JURÉ N°2 l'a encore prouvé), mais je le trouve trop tendre pour jouer ce Lex Luthor. Gene Hackman l'avait joué avec une facétie certaine, Kevin Spacey à grand renfort de regards noirs et Jesse Eisenberg en mode Zuckerberg sous acide. Hoult se montre plus sobre, mais la douceur de son regard ne colle pas avec la dureté du personnage décrit. Mais cela, bien sûr, est toujours affaire d'interprétation.

Un peu comme ce nouvel univers étendu. N'est-il pas un peu trop tard ? Le Marvel Universe est indéniablement sur la pente descendante et il semblerait que cette mode de l'univers partagé est en train de passer. Mais la WARNER y croit et on aura donc le droit à SUPERGIRL l'an prochain. Pas sûr qu'on revoit Superman de sitôt donc, lui qui sera probablement noyé dans les futures productions qui vont se mettre en route. C'est dommage, il méritait certainement plus de développement pour décoller réellement.

NOTE INDICATIVE : 12 / 20

SUPERMAN est actuellement disponible dans les salles de cinéma.