Critique de RUNNING MAN
CRITIQUES
Romain Jankowski
11/28/20252 min read


Près de 40 ans après la version de RUNNING MAN avec Arnold Schwarzenegger, qui ressemblait davantage au PRIX DU DANGER qu'au livre de Richard Bachman (alias Stephen King), Edgar Wright se met à la tâche de dépoussiérer cet excellent roman. Nihiliste, sombre, barré, voilà un ouvrage qui aura prédit certaines déviances du monde actuel avec un sens du récit comme seul King sait le faire.
Glen Powell en homme d'action
Mais RUNNING MAN en 2025 a-t-il encore une quelconque résonance ? Dans ce monde où les réseaux sociaux ont déjà largement aboli de nombreuses barrières morales et où certains chefs d'état se transforment autant en acteurs qu'en politiciens, suivre Ben Richards en train d'être pourchasser par des chasseurs et vendu par la population peut-il encore être pertinent ? La réponse est oui. Sous la houlette d'un cinéaste qui dégage souvent une certaine énergie dans ses films, RUNNING MAN reprend grandement les ingrédients du roman à quelques exceptions près (dont une sur laquelle je reviendrai plus tard). Glen Powell incarne un Richards bien remonté, mâchoires et muscles contractés au maximum. L'acteur s'en sort bien avec ce rôle peu évident où il doit manier à la fois l'humour, la physicalité, l'esprit rebelle et l'aspect sentimental. Puisque là se situe le coeur de l'histoire : Richards ne fait pas ça pour la gloire, mais pour faire vivre dignement sa famille.
Durant deux heures, le film a le pied appuyé sur l'accélérateur et difficile de bouder son plaisir devant un Blockbuster bien fichu et réalisé avec soin. Wright n'en oublie pas pour autant l'esprit du roman, tout en apposant sa patte et ses thématiques. Insister sur les dérives de l'image est une excellente idée, d'autant plus aujourd'hui où on y regarde à deux fois avant de s'assurer que ce qu'on voit est une bien image réelle et non modifiée par l'intelligence artificielle. En cela, RUNNING MAN questionne le spectateur sur ce qu'il voit et nous entraîne avec Richards dans sa fuite en avant. Le casting est à l'avenant, avec une mention spéciale à l'excellent Colman Domingo qui s'en donne à coeur joie dans la peau du présentateur Bobby Thompson.
Attention, cet ultime paragraphe contient des SPOILERS !
Evidemment, le récit mène inexorablement vers une fin aussi attendue que redoutée. Impossible dès lors de la dissocier de l'ensemble et c'est là qu'il est difficile de ne pas en tenir rigueur à Edgar Wright. Certes, dans l'esprit de son film, le fait que Richards reste vivant et mène la révolution reste un parti pris compréhensible. C'est beaucoup moins le cas de cette scène étrange où il retrouve sa femme et sa fille. Il y a tout de même peu de chances qu'un homme comme Dan Killian (Josh Brolin) les laisse sans surveillance... D'accord, le fait de retourner l'argument du crash d'avion contre Richards est habile... mais paraît présent uniquement pour donner une légitimité à la fin choisie. La fin du roman est absolu, nihiliste à souhait, complètement raccord avec la psychologie du personnage qui n'a plus rien à perdre. En rendant la fin du film plus "heureuse" et surtout moins sombre, Edgar Wright égratigne un peu l'ensemble qui aurait mérité une résolution sans concession. C'est la limite d'un Blockbuster qui ose au moins bousculer les choses et parler de sujets forts.
NOTE GLOBALE : 14 / 20
RUNNING MAN est actuellement disponible dans les salles de cinéma.
