Critique de L'AMOUR AU PRESENT

Mon avis sur le film L'AMOUR AU PRESENT.

CRITIQUES

Romain Jankowski

1/1/20252 min read

John Crowley sait dépeindre le parcours d’hommes et femmes qui doivent se dépatouiller avec un pesant passé. Je pense notamment à BOY A, pépite indé qui a révélé Andrew Garfield ou BROOKLYN, dans lequel Saoirse Ronan trouve l’un de ses meilleurs rôles. C’est un excellent directeur d’acteurs et un cinéaste de fond, qui étudie les sentiments humains avec une diabolique précision.

Casser la linéarité

L’AMOUR AU PRESENT avait tout pour être une explosion d’émotions. On y suit Tobias (Andrew Garfield) et Almut (Florence Pugh), deux êtres que la vie réunit et qui traversent les épreuves ensemble. Une simplicité désarmante, la promesse d’un moment fort et unique. Pour mettre en scène cette chronique, Crowley use, avec le scénariste et dramaturge Nick Payne, d’un procédé qui déstabilise vite notre regard de spectateur : le saut dans le temps. Dans sa logique de capter ces moments qui vous changent et vous transforment, les deux hommes font le choix de casser la linéarité du récit pour mieux l’embellir (en tout cas dans l’intention). En l’état, difficile d’apprécier réellement ce parti pris. L’AMOUR AU PRESENT semble alors s’intellectualiser, rendre complexe ce qui devait avant tout être simple. Une intention qui joue donc à l’encontre du but recherché.

Un manque d’émotions

Malheureusement, le film souffre de cette distorsion du temps. L’évolution de la relation entre Tobias et Almut est malmenée, naviguant entre les temporalités sans nous ancrer véritablement dans les émotions. On a alors du mal à saisir toutes les émotions qui les traversent, malgré la capacité d’Andrew Garfield à réellement incarner son personnage. On lui impose donc le jeu plus brut de Florence Pugh qui interprète une femme libre, n’ayant aucune volonté d’être enfermée dans les carcans sociétaux. On en rajoute une couche sur cette vision de la femme impitoyable qui se ferme à l’émotion. Là encore, une erreur, l’alchimie entre les deux ayant donc dû mal à filtrer. Une distance se forme et elle ne se raccourcit jamais véritablement, malgré les épreuves difficiles qu’ils traversent. Il aurait peut-être fallu apporter plus de consistance dans leur relation et creuser davantage certaines pistes narratives pour renforcer la relation à l’écran. Un exemple, ce passage où Tobias parle d’un futur enfant paraît mal amené. Sa résolution est également un peu décevante, donnant l’impression que le montage enchaîne les vignettes sans véritablement les lier.

Les deux acteurs jouent donc leur partition avec une certaine aisance, peu aidés, il est vrai, par l’absence de réel personnage secondaire. Le tableau ne doit pas non plus être noirci par les défauts qui empêchent L’AMOUR AU PRESENT d’être un grand film. Il y a des passages vivants et touchants, ceux qui vous font rire ou pleurer. La tragédie renvoie à l’amour, l’amour amène les situations cocasses parfois contrebalancées par des instants plus graves. John Crowley ne réussit pas tout, mais parvient à toucher les spectateurs qui établiront des connexions avec ces deux personnages ayant décidé de vivre chaque instant comme si c’était le dernier.

AVIS GLOBAL : Dans ses partis pris, L’AMOUR AU PRESENT peut déplaire et dérouter quelques spectateurs. Certains d’entre eux empêchent parfois l’émotion de naître, même si quelques séquences valent le détour.


NOTE INDICATIVE : 11 / 20