Blue Velvet, l’histoire d’un renouveau artistique pour David Lynch
RÉTROSPECTIVE DAVID LYNCH
Romain Jankowski
1/21/20252 min read


Psychanalyse, étrangeté, sexualité, personnages hors du commun, pas de doute, BLUE VELVET est un film 100 % « Lynchien ». Après l’émotionnel ELEPHANT MAN et la grosse production DUNE, le cinéaste revenait à une forme plus sombre de son art, plus trouble aussi, celle qui l’avait vu démarrer avec l’hors normes ERASERHEAD.
De nouveaux éléments
BLUE VELVET symbolise beaucoup pour Lynch. C’est une forme de renouveau après le fiasco DUNE (voir ici) et cette grosse machinerie qui l’a éloigné de son art. Au-delà de la dimension moins spectaculaire de la production, ce projet offrira à Lynch de belles rencontres humaines, comme celle d’Angelo Badalamenti qui travaillera alors sur tous les films du cinéaste (sauf INLAND EMPIRE). Il y aura également Laura Dern et Isabella Rossellini. Kyle MacLachlan fait de nouveau équipe avec le réalisateur après leur collaboration sur DUNE. Toutefois, ce n’est pas lui qui devait, de prime abord, obtenir le premier rôle, mais… Val Kilmer. Le jeune acteur (qui n’est pas encore une vedette puisque TOP GUN s’apprête à sortir) refusa illico la proposition suite à la lecture du scénario qu’il jugea… pornographique !
Mystères et troubles
L’action de ce BLUE VELVET (magnifique titre) se situe ) Lamberton, petite ville imaginaire appartenant à une région forestière où l’exploitation de bois est la ressource économique principale. Un jeune étudiant, Jeffrey Beaumont (MacLachlan), est brusquement rappelé de ses études supérieures par sa famille suite à l’attaque cardiaque dont vient d’être victime son père. Il fera ensuite la découverte d’une oreille humaine coupée dans un champ, ce qui l’emmènera dans les eaux troubles de cette drôle de ville… D’apparence paisible, avec ses petits pavillons et sa douce lumière, Lamberton renferme un monde de brutes où l’affreux Frank Booth (joué d’une main de maître par Dennis Hopper) retient en otage le mari et le jeune fils d’une chanteuse de cabaret (Rossellini). Elle doit se soumettre au fantasme de cet homme impitoyable sous peine de ne plus jamais les revoir.
Lynch nous malmène et nous offre un panorama violent de la perversité humaine. BLUE VELVET aurait pu être un film-fleuve puisque le premier montage durait près de… quatre heures ! Le producteur Dino de Laurentiis l’avait contractuellement obligé à livrer un métrage de deux heures et coupera donc de nombreuses intrigues secondaires. Le réalisateur s’y plie, ce qui n’empêche pas à l’ensemble d’être le parfait reflet des intentions de son auteur. Rythmée par l’excellente bande-originale de Badalamenti, cette ballade aux multiples grilles de lecture rend également hommage à l’Amérique des années 50, période du phénomène rock’n roll et des voitures chromées. C’est une plongée dans le passé, une façon pour Lynch de se reconnecter avec soi-même et d’affirmer sa vision d’artiste : à partir de là, ses films diviseront tout le monde. Mais n’est-ce pas la finalité de l’art ?
Un renouveau artistique
Produit pour 5 millions de dollars, BLUE VELVET ne rentre pas dans ses frais avec 8 petits millions rapportés. Il sera, en revanche, couvert de prix dans divers festivals à travers le monde. Ce film lance surtout une nouvelle ère pour le cinéaste qui remportera la Palme d’Or avec SAILOR ET LULA et lancera le phénomène TWIN PEAKS à la télévision.