À la rencontre de Forrester, l'ultime étincelle de Sean Connery

ANALYSES

Romain Jankowski

11/21/20253 min read

C'est l'avant-dernier rôle de sa carrière d'acteur et celui-ci s'avère l'un de ses plus beaux. Il incarne ici William Forrester, un écrivain presque légendaire, qui vit retiré depuis des années après avoir signé un unique chef-d’œuvre. En parallèle, un adolescent prodige du basket à l'écriture sensible, Jamal (Rob Brown).

L'après WILL HUNTING

Les deux destins vont se rencontrer et vont s'entraider. Une belle histoire, bien plus profonde qu'elle n'y paraît. Le réalisateur Gus Van Sant retrouve ici la relation du mentorat et de l'apprentissage qui était le coeur même du film WILL HUNTING. Le script est signé Mike Rich, qui signait là son premier scénario et qui a fait du sport son mantra. Le projet mûrissait depuis près de dix ans, avant de prendre une nouvelle ampleur quand Sean Connery s’engage comme producteur et acteur. Le cœur du film repose sur l’apprentissage. Forrester n’est pas juste un professeur : il est un mentor avec ses blessures, sa méfiance, ses idéaux, et Jamal n’est pas seulement un élève : il est un jeune homme en quête de vérité. C'est cette force que Connery a aimé et qui l'a poussé à s'engager dans ce film. D'ailleurs, les recherches effectuées par Jamal tout au long du récit sont issues du véritable parcours de Connery ! Un rôle presque autobiographique ?

Une relation forte

Connery, impérial, trouve donc ici l’un de ses derniers grands rôles : un écrivain aigri, paranoïaque, cabossé par son propre génie. Un personnage qui, selon Van Sant, s’inspire librement de Salinger, sans en être une reconstitution. La rencontre entre Forrester et Jamal n’a rien du cliché habituel du « vieux sage » et de l’élève. C'est également le premier rôle de Rob Brown, qui ne connaîtra malheureusement pas une immense carrière. On notera toutefois qu'il fut remarquable dans COACH CARTER aux côtés de Denzel Washington, mais aussi à la télévision dans BLINDSPOT ou plus récemment dans WE OWN THIS CITY. Dans À LA RENCONTRE DE FORRESTER, les deux apprennent l’un de l’autre. Le parcours des deux comédiens se mêlent avec celui de leurs personnages. Jamal ne cherche pas un père de substitution. Il veut un guide. Forrester ne veut pas un héritier. Il veut une raison de réouvrir sa fenêtre. Ensemble, ils relèvent un défi invisible : apprendre à ne plus se cacher. L’écriture, dans À LA RENCONTRE DE FORRESTER, n’est pas un talent abstrait. C’est un combat. Forrester, terrifié par les attentes du monde, n’a plus rien publié depuis son chef-d’œuvre. Jamal, lui, doit se battre pour prouver que son intelligence n’est pas un accident statistique. Le moment où Forrester dit à Jamal : « Le premier jet, tu écris avec le cœur. On corrige avec la tête. » rappelle à quel point le film est une ode à la création, à l’audace d’exister à travers les mots.

La postérité

Plus de vingt ans après sa sortie, À LA RENCONTRE DE FORRESTER conserve une force intacte. Certes, il n'a jamais possédé l'aura d'un WILL HUNTING, mais il n'en demeure pas mois très intéressant dans ce qu'il démontre. Peut-être parce qu’il refuse le cynisme, peut-être parce qu’il croit encore à la magie des rencontres qui changent une vie. Le film rappelle qu’un mentor n’est pas un modèle à imiter mais un regard qui encourage, un souffle qui libère. Gus Van Sant signe un récit à la fois intime et universel, qui mérite d'être redécouvert.